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La route est comme un fil rouge qui relie les différentes contrées d’un pays. Elle fait lien entre ses diverses atmosphères. En Amérique du Sud, les routes sont très longues et les univers s’étendent sur des milliers de kilomètres. Pourtant, on trouve parfois des lieux qui condensent mille mondes en un, et des glaciers qui courent sur toute la moitié Sud du Chili ! La Cordillère des Andes est une exposition de merveilles naturelles.

C’est dans ce terrain de jeu que j’ai pris la route il y a 2 semaines. Vaillante et motivée, j’ai tendu le pouce à 8h du matin en sortant de la maison de mes amis de Punta Arenas ; à 8h10 un camionneur s’est arrêté. Celui-ci m’affirme que sa route passe tout proche de ma prochaine destination. Parfait ! Quelques heures plus tard, j’ai compris qu’il faut toujours se méfier des gens qui promettent monts et merveilles, car il semblerait que ce cher camionneur m’ait oubliée à la frontière…

Après avoir rebondi sur un plan B, j’ai fini par trouver les monts et les merveilles dans un lieu qui s’appelle El Chaltén. Ce petit village, construit il y a 40 ans pour confirmer que le territoire était bien argentin et non chilien…, est le paradis des escaladeurs, l’eldorado des marcheurs, la perle rare des voyageurs, la beauté naturelle incarnée. La route qui mène à El Chaltén s’arrête à El Chaltén car cernée par les montagnes. Et quelles montagnes ! Impossible d’en trouver deux semblables ! « El Chaltén » signifie « montagne qui fume » dans le dialecte des aborigènes d’antan, car le sommet le plus proche est tellement haut que les nuages s’accrochent toujours dans son rocher. Mais moi, j’ai rebaptisé ce lieu « le village aux milles montagnes ». Je suis restée sans voix lorsque j’ai découvert une colline sèche et aride avoisiner à la fois un glacier et un mont verdoyant. Le décor de L’Âge de glace s’enchaîne avec celui du Seigneur des Anneaux, et finit par le monde d’Ali Baba. Derniers résidus de l’ère glaciaire, El Chaltén incarne le changement climatique.

Parfois, manger des pommes a du bon. A l’instar des fumeurs qui sociabilisent par leur addiction commune, j’ai rencontré Dan qui prenait sa pause-pomme en même temps que moi, devant le célèbre glacier le Perito Moreno d’El Calafate. Sensationnel et imposant, ce miroir de glace fait face aux spectateurs, et coule, craque, bouge et avance à vue d’œil. Tous les deux estomaqués, nous avons échangé nos impressions respectives puis décidé de rentrer en stop ensemble. Fraîchement sorti du bac, Dan est un cosmopolite polyglotte qui vagabonde de continent en continent. Avec lui, j’ai campé au pied d’un glacier, mis les pieds dans le lac du glacier (tandis que lui s’y est baigné), grimpé des sommets, parcouru 700km en stop, et bien rigolé !

J’ai continué ma route seule sur la carretera austral chilienne qui serpente à travers la Cordillère des Andes. Perchée dans les nuages, cette route nous conduit au cœur du chevauchement des plaques tectoniques. Là, les monts se dressent, les pics touchent la couche d’ozone et la Nature reprend ses droits. Coincé entre deux monts, le village de Santa Lucia a été rasé par des pluies torrentielles en décembre dernier. Il n’en reste plus que la moitié et un énorme terrain de boue retournée.

Cette route m’emmène dans un autre monde… Tous sens éveillés, je ne cesse de m’émerveiller à chaque virage, à chaque nouvelle vue, à chaque lac toujours plus bleu. Sur la route, les rencontres et les aventures sont nombreuses et constituent petit-à-petit ma vie de roots que j’expérimente avec plaisir et légèreté.