Episode #9 : Ushuaïa, ça se mérite

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Le « bout du monde » ! Qui l’aurait cru ? C’est arrivé si vite, sans prédiction ni préparation. De fil en aiguille, de connaissance en ami, le vent m’a poussée jusqu’à Ushuaïa.

La route a été longue : 3 jours de camion. Heureusement, le mien transportait de la bière et son chauffeur ne lésinait pas sur le partage ! Ce n’est pas un mythe, tout le monde fait du stop en Patagonie. Ici, les camions sont le moyen de transport alternatif aux bus. Les 3070 km de la Ruta 3 qui relie Buenos Aires à la Terre de Feu fatiguent les camionneurs. Alors forcément, avoir des mochileros dans la cabine, ça met un peu de piment dans le travail. C’est comme un échange de bon procédé : je t’emmène gratuit, tu me divertis. A l’avant d’un 18,50m qui pesait 42 tonnes, 10km/h dans les côtes – 70 dans les descentes champignon écrasé, on saisit vite l’inutilité de parler d’heure d’arrivée. En revanche, on parle musiques, on danse, on chante à tue tête. On parle maté, et on prépare le maté en roulant. On parle repas, et on prépare le repas en roulant… J’ai réalisé que la cabine d’un camionneur était pleine de vie, ou plutôt que c’était toute sa vie.

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Au bout de cette longue route, on tombe sur Ushuaïa, cette ville lointaine, nature, merveilleuse, presque mystique et imaginaire tellement elle se trouve loin, perchée entre océan et montagnes. Dans ce lieu inatteignable ont poussé une ville et sa société, composée de gens en quête de quiétude et d’identité, venues pour se construire en même temps que la cité. En effet, Ushuaïa est jeune et sa fondation a été un véritable défi. Pendant la première moitié du XXème siècle, on y jetait en prison les criminels récidivistes les plus récalcitrants. Petit-à-petit, une communauté s’est créée. On a creusé des puits de pétrole et installé quelques usines d’électronique. Puis Ushuaïa est devenue un centre administratif, un pilier de la Province de la Terre de Feu et une référence touristique. C’est d’ici que partaient les combattants argentins pour aller délivrer les îles Malvines des griffes de Thatcher en 1982. C’est d’ici que partent tous les bateaux en expédition pour l’Antarctique. Et c’est d’ici que partent toutes les croisières touristiques pour admirer les pingouins sur les côtes alentours. Le monde fantastique d’Ushuaïa est comme un havre de paix perdu au bout du monde, généreux en Nature, faune, flore et couleurs ; où les rêves peuvent devenir réalité, aux fruits de quelques efforts accomplis.

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Pour profiter de sa beauté, il faut monter en haut des sommets, se battre contre vents et marées et surtout contre le centre de gravité. A l’envers sur la Terre, la pesanteur est aussi grande que ce que le globe tourne moins qu’à l’équateur. Au XVIIème siècle, Richer avait expliqué la relation entre la pesanteur et la latitude : l’effet de la rotation terrestre crée une force centrifuge, qui est maximale au niveau de l’équateur et minimale aux pôles Nord et Sud. Il n’y a qu’en voyage qu’on peut se replonger dans les cours de physique-chimie…

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Mais, soulever ses jambes deux fois plus lourdes que d’habitude jusqu’au sommet du Guanaco ou du glacier d’Ushuaïa vaut vraiment la peine : un étalage de mer sillonnant entre les monts, des lacs naturels d’un bleu plus qu’éclatant, de la neige éternelle touchable… Ça, c’était l’idée de Léopold, mon compagnon de baroudage du moment rencontré sur place. Arrivés presque au sommet du glacier en baskets et legging troué, après une heure d’escalade dans un terrain non-autorisé…, on s’est posés admirer la vue. Et d’un coup, un énorme bloc de pierre s’est décroché à quelques mètres de nous, entraînant d’autres morceaux, roulant jusque dans la vallée. Ni une ni deux, on est vite redescendus !

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Ushuaïa…

Ce lieu étrange, sur cette Terre de Feu, baptisée ainsi par Magellan l’explorateur, qui de son bateau apercevait les feux des aborigènes parsemés sur l’île ; une île mystérieuse regorgeant d’histoires et de légendes anciennes sur ces chaînes de montagnes inhospitalières.

Pour l’atteindre, il faut montrer de la détermination. Pour en jouir, il faut laisser naître l’émerveillement. Ce lieu est revigorant, plein d’énergie, comme un tremplin qui va me propulser loin dans le continent.

7 réflexions sur “Episode #9 : Ushuaïa, ça se mérite

  1. Blandine Aubry

    Quelle aventure!!
    Nous te suivons(irrégulièrement ) sur l’atlas. Tu nous fais réviser nos cours de géo, d’histoire, de physique -chimie aussi.
    Nous t’admirons pour ton enthousiasme, ta gaité, ton humour, ta forme, ton style, ton ouverture d’esprit, ton érudition . . .
    Tu es partout chez toi!
    C’est extra d’avoir pu jouer sur le piano de Manuel de Falla!
    Nous te souhaitons bonne route et encore beaucoup de belles rencontres.

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    1. Merci pour vos voeux et ces beaux compliments ! 🙂 J’essaie toujours d’apprécier chaque moment avec intensité, et il en ressort beaucoup d’apprentissages, ou de ré-apprentissages..
      C’est vrai que je rencontre des gens extraordinaires qui m’aident à me sentir chez moi partout dans le monde. C’est un point central dans mon voyage, car c’est aussi grâce à eux que j’apprends à connaître très rapidement les sociétés que je visite.
      Je me réjouis de voir que ce partage d’expérience vous plait !
      A bientôt pour de nouveaux récits 🙂

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  2. Luc

    …Ushuaïa ! Que de beaux paysages vus à la télé..dans l’émission du même nom, ça fait toujours rêver !
    De te savoir là-bas au bout du monde , toucher du bout du doigt et découvrir ces lointaines contrées …je t’envie !!
    Découvre, déguste et continue de nous raconter pour notre plaisir à tous…Bisous.

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